Café-Orge, Entre Palaiseau et Sainte Geneviève des Bois (91)

Texte de Johanna Pernot

Troquet de Palaiseau, près de la gare,
Café collectif comme une rivière noire 14 cercles
Et trois fois plus de visages
Où déjà le soleil aime à plonger
Les croissants sont des tiares
Les doigts suivent des méandres de carte – 10h30 : le départ.

Nous traversons des espaces vides
Terrain de foot ocre sableux
Châteaux ambulants, volets bleus, jaunes, rouges pointus, cœurs étoilés
Leurs escaliers s’envolent (des prêtres y sont enterrés)
Canal où se mirent les graffitis jaillis des têtes aliénées,
des bombes aérosols à donner les vertiges
Sous le tunnel, les monstres falots nous sautent à la gorge
L’Yvette complice, l’Yvette expulse sur son ciel de béton
Les liserés du plus beau des miroirs – l’invisible, l’insaisissable
L’œil fasciné y palpite
Les baskets courent sur la passerelle
Break on through to the other side - De l’autre côté
De l’autre côté comme les ruines sous la jungle se cache
Le bunker brutalisé,
La maison des graffs.
Dans les conduits, les trous du cerveau alambic
Grillé
Fusent les mots, les créatures bouillies du chaudron pictural
Projections pariétales
L’esprit erre
Dans les pièces débridées

Vous n’avez pas la priorité
Les routes ne sont pas faites pour qu’on les suive
The road is not taken
Zigzags d’eau, de bitume, seigle et azur
Planté d’aiguilles 400 000 volts
Nos pieds sont des couseurs d’espace
Des chercheurs d’ombre et de patchworks

Les peupliers sont des barrières

Les nuages flottent comme au Far West

Triangle Vert, champs magnétiques
Les pensées germent et s’électrisent

Au cœur de la forêt
La carrière est la dune où se creuse le rêve éclatant d’un monarque
C’est un pique-nique lunaire, dans l’orbe du soleil Adossé au Rocher
Et Hans-Peter sait tout

Puis l’œil vagabonde dans des vallons impressionnistes –
ciel et céréales mûrs, piqués de coquelicots
Terre crantée des roues motocross
Au bout d’un tableau de Monet se dresse un abattoir fantôme
Un château d’eau à sec
Les fenêtres défenestrées ont des cris d’écorché Derrière,
Les wagons ne passent plus
Les escaliers se jettent dans le vide
Seules les couleurs saignent
Au bout du crochet

A La Ville-du-Bois,
La cathédrale du Carrefour Drive blanchit l’horizon
Les couloirs de la N20 catalysent la crasse carbone
Le bar portugais s’improvise meilleure source minérale

Enfin, Sainte-Geneviève-des-Bois : havre
Où les hauts murs mûrissent la beauté des cerises, des arbres centenaires
On boit le dernier café à l’ombre d’une caravane
Les chèvres goguenardent

Les jambes
La sueur
Sont gourdes...

Puis un plongeon, et tout s’efface –
Dans la fraîcheur piquante de l’Orge